INTERVIEW - MUSIQUE, CINÉMA & ARCHITECTURE

RENCONTRE AVEC NICOLAS DE FERRAN, COMPOSITEUR

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    Nicolas de Ferran © Konstantin Lucas Mikaberidze

    1/ Quelle est votre relation à l'architecture, en tant qu'individu d'une part, mais aussi en tant que musicien ?

     

    Nicolas de Ferran : Je suis depuis toujours un amateur d'art de manière générale, et l'architecture en est bien évidemment un, c'est même le premier de la classification d'Etienne Souriau.
    L'architecture et la musique sont très proches. Les deux reposent sur la structure ou l'absence de structure, sur l'équilibre ou le déséquilibre, le rythme, la répétition, les formes… Tout comme l'écriture, la danse, la peinture… Il y a de manière générale énormément de similitudes entre les différentes formes d'art.

     

    2/ Pourriez-vous nous partager une émotion architecturale ? Et une émotion musicale ?

     

    NDF : C’est peut-être un peu cliché, mais une émotion architecturale qui me marque toujours est la sensation de grandeur et de solennité que l’on ressent en entrant dans une cathédrale. Dès que l’on passe le seuil, on est enveloppé par l’immensité de l’espace, la hauteur des voûtes, la lumière tamisée par les vitraux… Ce type de lieu impose un respect presque instinctif, une impression de petitesse face à quelque chose de beaucoup plus grand que soi. L’échelle monumentale des lieux nous pousse à la contemplation et à l’introspection. En musique, j'éprouve une sensation similaire en écoutant la symphonie n°2 de Mahler, particulièrement pendant le 5ème mouvement durant le choral de cuivres, ou pendant le finale. On se sent transporté par une force invisible qui nous dépasse et nous élève. C’est une expérience presque spirituelle.

       

    3/ Quel est votre lien avec l'œuvre de Metropolis et pourquoi avoir proposé une composition musicale pour ce film en particulier ? Comment vous avez choisi ce film ?

     

    NDF : Je suis friand de cinéma d’animation et d’illustration. Metropolis occupe une place particulière dans mon cœur. Quand il a fallu trouver un film ayant un rapport à l’architecture, j’ai pensé à celui-là immédiatement. Les créateurs du film ont fait un travail incroyable sur le design de la ville, qui est immense, complexe, construite de manière verticale sur plusieurs niveaux, symbolisant à la fois les divisions sociales et les contrastes entre richesse et pauvreté, modernité et déclin. Le film réussit à fusionner les influences de l’art déco, du cyberpunk et du modernisme avec des détails méticuleux. C’est très beau et très impressionnant à voir. Il a été l'un des premiers films d'animation japonais à utiliser de manière significative l'intégration de la 3D avec l'animation traditionnelle en 2D et a donc eu une influence considérable sur les productions d’animation des deux décennies suivantes.

     

    4/ Quelles ont été vos sources d'inspiration ? Vous dites que votre composition ne cherche pas à remplacer la bande-son originale, est-ce que vous êtes resté dans l'influence du compositeur Toshiyuki Honda ?

     

    NDF : Effectivement, mon but n’était pas d’essayer de changer, modifier ou remplacer ce qui a été fait avant. Pour moi, changer la musique d’un film c’est comme changer les acteurs. Ça parait impensable. Je ne voulais donc pas refaire la musique du film, mais plutôt proposer une expérience musicale autour du film. La différence peut paraître subtile, voire abstraite, mais je pense qu’elle est très importante. La musique que j’ai composée n’a rien à voir avec ce qu’a fait Toshiyuki Honda. Même si j’adore ce qu’il a fait, je voulais vraiment m’en éloigner, ne pas lui marcher sur les pattes. 

     

    5/ Quelle est votre démarche pour que l'architecture se manifeste/transparaisse dans votre musique ? Pour proposer un paysage sonore à l'architecture ?

     

    NDF : Je pense qu’en Art, quand on veut représenter une œuvre architecturale, on ne cherche pas à la représenter telle qu’elle est, mais plutôt de représenter les émotions qu’elle nous évoque. J’ai suivi ce principe pour ce ciné-concert. J’ai essayé d’exprimer la grandeur, le déclin, la richesse, la pauvreté, l'oppression, l’espoir… C’est ce que les illustrations architecturales évoquent également dans le film.

     

    6/ Votre plan/paysage préféré du film, celui qui vous a le plus inspiré ?

     

    NDF : Je pourrais encadrer chaque frame (image) de Metropolis et les afficher chez moi tellement je trouve le film beau. Mon plan préféré est celui où Tima est suspendue dans le vide alors que le Ziggurat se détruit autour d’elle, à la fin du film. Les créateurs du film ont réussi en seulement quelques frames à lui donner un regard à la fois vide et plein d’émotions, c’est magistral. J’aime également beaucoup l’un des derniers plans du film quand Kenichi dit qu’il préfère rester à Metropolis plutôt que de rentrer chez lui. Il est dans l’ombre au premier plan, et les ruines de Metropolis sont derrière lui dans la lumière du soleil, et prennent toute la place sur l’image (on ne voit pas le ciel), ce qui donne une sensation d’échelle incroyable.

    Retrouvez les informations détaillées sur le ciné-concert par Nicolas de Ferran le 16 novembre à 20h30 à l'Autre Canal à Nancy en cliquant ici !

    Nicolas de Ferran © Nicolas de Ferran
    Affiche du film Metropolis de Rintaro, 2001 © Rintaro
    Tima suspendue dans le vide © Metropolis de Rintaro
    Kenichi qui annonce rester à Metropolis © Metropolis de Rintaro
    Informations pratiques

    Ciné-Concert par Nicolas de Ferran sur le film "Metropolis" de Rintaro
    Samedi 16 novembre - 20h30

    Nancy - L'Autre Canal
    45 boulevard d'Austrasie

    Tarifs : 5€/3€
    Réservations en cliquant ici !

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